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Paru le jeudi 6 mai 2004

Le Rituel de Puissance ép. 1

Lisez les prologues si ce n’est pas déjà fait avant de continuer plus long !
Et voilà ! La première partie de ma fan-fiction ! (je ne pense pas qu’un prologue compte pour une partie). Celle-ci, comme son nom l’indique, est entièrement consacrée à Shadow. Ça devrait en réjouir plus d’un. Je note que l’histoire se passe après Sonic Heroes, ceux qui la lisent doivent d’abord s’informer sur l’histoire (remarque, je ne pense pas qu’il y en ait beaucoup qui ne se soient pas au moins informés sur cet excellent jeu). Sinon, pas la peine de chercher sur une quelconque carte les noms de montagnes ou de volcans que je pourrais, éventuellement, citer. J’invente tout !

Poursuivre le passé

Shadow se réveilla, sans pour autant ouvrir les yeux. Sa nuit passée à la belle étoile ne l’avait pas vraiment reposé, mais ce n’était pas la seule raison pour laquelle il ne se levait pas. Il réfléchissait. Au sujet de ses rêves, pour être précis. C’était toujours à peu près la même chose : des centaines de clones, moitié robot, moitié Shadow, qui surgissaient d’innombrables capsules, semblables à celle d’où lui-même était sorti. Il cherchait à s’enfuir, mais ses jambes refusaient d’obéir. Il baissait alors les yeux pour s’apercevoir qu’elles étaient de métal. Il s’apercevait également que lui aussi, il était prisonnier d’une capsule. C’était toujours le même, avec quelques variantes.
Cependant, une chose ne changeait jamais : à un moment, tout disparaissait, et il se retrouvait dans une salle brumeuse et obscure. Il n’y était pas seul. Il y avait une créature immense, tellement immense qu’elle n’aurait pas pu tenir tout entière dans un hangar à avions vidé de son contenu. Jusqu’à présent, il n’avait jamais vu ne serais-ce que la silhouette de la créature. Une fois, une seule, il avait cru distinguer un cou démesuré. Était-ce un de ces dinosaures géants du jurassique ? Il ne l’avait pas encore vu d’assez prêt.
Ce qui ne changeait jamais non plus, c’était la manière dont il se réveillait. Il se réveillait en sursaut, sur le point de crier quelque chose. Mais il ne disait rien. Il ne savait pas ce qu’il aurait pu crier. C’était peut-être quelque chose qu’il avait connu, avant…
Ou alors, quelque chose que son original avait connu.
Cette pensée le faisait toujours frissonner, effrayé à l’idée d’être un robot. Certains auraient pu penser que cette phrase pourrait le rassurer : « Je pense, donc, je suis. », mais il n’en était rien. Après tout, les robots du docteur Eggman n’étaient-ils pas capables de penser ? Omega, le robot qui les avait aidés, ne disposait-il pas d’un esprit à peu près aussi complet que celui d’un être vivant, mis à part ses termes de machine ?
Impossible d’être sûr. Il cherchait donc à se souvenir.
Il avait réfléchit au mot qu’il s’apprêtait toujours à crier, après ses cauchemars. Ca ressemblait à un mot court. Deux ou trois syllabes, tout au plus. Il avait également l’impression que le mot en question commençait par une consonne. Après de nombreuses heures passées à réfléchir, il avait conclu que cette lettre était soit un « m », soit un « n ».
Pour trouver un mot de deux ou trois syllabes commençant par « n » ou « m », on pouvait passer le restant de ses jours à regarder dans des dictionnaires. Il faut bien dire qu’entre « méchoui » et « nordique », il y avait pas mal de mots, même en admettant que le mot qu’il s’apprêtait à prononcer n’était pas dans une autre langue. Mais à part chercher au hasard, que pouvait-il bien faire ?
Chercher au hasard, c’était exactement ce que Shadow faisait. Depuis plusieurs semaines, maintenant, il passait le plus clair de son temps à voyager, prenant à chaque fois le temps d’observer avec attention ce qu’il voyait, avec le mince espoir de trouver quelque chose qui lui rappellerait son passé. Il cherchait aussi l’endroit où Eggman aurait pu cacher sa base. Il était persuadé que là-bas, il trouverait des réponses à ses questions. Jusqu’à présent, ses recherches avaient été vaines, mais aujourd’hui…
Il s’était produit une chose anormale. Cette nuit-là, au cours de son rêve, quelque chose s’était produit. Au moment où il débouchait dans la salle brumeuse, au lieu de voir l’immense forme indistincte, une sphère de verre, parfaitement précise, était apparue sous son nez. Une voix s’était alors élevée :
-L’une des bases d’Eggman se trouve à environ trente kilomètres vers l’est de l’endroit où tu te trouves actuellement, dans une plaine où s’élève un rocher peu habituel. Elle est cachée sous terre. Tu y accéderas en suivant un robot, ils rentrent tous dans la base vers 11h de la matinée. Mais tu trouveras la réponse à tes questions au cœur du plus ancien volcan de cette Terre.
Shadow s’était ensuite réveillé. Il se souvenait très clairement des paroles qu’il avait entendues, et plus curieux encore, il tenait serrée dans sa main une sphère de verre. A peu près aussi grande qu’une balle de jonglage, elle était parfaitement identique à celle qu’il avait vue.
Le hérisson ouvrit enfin les yeux, se redressa et s’étira. Il était allongé sur un champignon un peu plus petit que les autres, à bonne distance des grenouilles pour éviter de dormir sous la pluie. Il se trouvait presque à la lisière de Frog Forest. Il sortit, d’un sac qu’il portait en bandoulière, une tranche de fruit géant. Courir à jeun pendant des heures ne lui disait rien, surtout quand il faut faire les inévitables acrobaties pour traverser une forêt comme Frog Forest.
Son repas terminé, il se leva et réfléchit : devait-il suivre les indications qu’il avait entendues en rêve ? Shadow ne croyait pas aux prédictions, mais cette voix lui avait semblé trop réelle pour faire partie d’un rêve. Et ses indications étaient trop précises. Et, bien sûr, il y avait cette sphère qu’il tenait toujours serrée dans sa main. C’était à n’y rien comprendre.
-Elle disait que la réponse à mes questions se trouvait dans un volcan. Songea-t-il, mais elle m’indiquait la position de la base d’Eggman. Qu’est-ce que je suis sensé trouver là-bas ? L’emplacement du volcan ?
Finalement, il décida de vérifier si ce qu’il avait entendu était exact. S’il trouvait la base d’Eggman à l’endroit indiqué, il suivrait les conseils de cette voix. Il irait chercher dans le plus vieux volcan du monde…

Anabora

Shadow sauta à bas de son champignon et regarda autour de lui. Comment continuer ? Le prochain champignon se trouvait beaucoup trop loin pour qu’il puisse l’atteindre en sautant.
Il s’approcha du bord et examina le champignon. Finalement, il dénicha un début de liane, à peine visible, mais déjà très large. Il se souvint de cette technique qu’il utilisait avec Rouge et Omega. Il regarda derrière lui et vit une énorme grenouille qui sautillait non loin de là. Shadow soupira, puis s’approcha de l’amphibien. Celui-ci, paniqué, se mit à croasser nerveusement. Le hérisson serra les dents tandis que la pluie lui tombait dessus. Il n’aimait pas beaucoup l’eau, et il ne comptait plus le nombre de fois où il avait dû se faire saucer pour continuer son chemin. Impossible de traverser cette satanée forêt en conservant ne serait-ce qu’un poil sec !
Heureusement, cette fois, il n’avait pas pris le même chemin qu’avec ses coéquipiers, celui qui coupait par les marais. Ces marais-là étaient particulièrement mal famés. Mis à part la boue et les moustiques (très gênants pour la course), on y trouvait deux fois plus de grenouilles, donc deux fois plus de flotte ! Il y avait aussi ces grenouilles noires qui, non seulement vous trempaient, mais en plus faisaient mourir la plante sur laquelle vous vous trouviez ! Shadow avait préféré éviter les marécages…
La pluie arrêtée, le hérisson retourna vers la liane, sans prêter attention à la grenouille qui s’enfuyait. Elle semblait être en train de bouger ; en fait, elle était en train de pousser en vitesse grand V. En accéléré, quoi.
Sans plus attendre, Shadow s’engagea dessus, prenant instinctivement une position de grind. La liane poussait au fur et à mesure qu’il progressait, un peu plus vite, même. Le hérisson effectua à deux reprises un demi-tour, pour prendre de la vitesse. Il grindait à présent sur l’extrême bord de la liane, sans voir où il allait. Une sensation grisante.
Il en profita également pour regarder le paysage. Frog Forest était, il fallait bien l’admettre, une forêt magnifique. En raison des pluies fréquentes, les arbres et les champignons étaient humides, et on pouvait, en permanence, voir un arc-en-ciel à l’horizon. Les énormes champignons étaient impressionnants, avec leurs lianes géantes qui pendaient de tous les côtés. La forêt était sillonnée par une rivière, ou plutôt un fleuve. A l’horizon, on voyait d’immenses formes arrondies, que Shadow avait d’abord pris pour des montagnes. En fait, il s’agissait de champignons…
La liane bifurqua, prenant la direction de l’est. De ce côté, la forêt arrivait à sa limite. Les champignons y retrouvaient une taille à peu près ordinaire, et les grenouilles géantes se faisaient rares. Shadow sauta de la liane avant que celle-ci ne change de direction. Mieux valait continuer par la forêt plutôt que par les champignons.
Tandis qu’il marchait, il s’aperçut qu’il tenait toujours la sphère de verre. Il s’arrêta et la regarda. Que fallait-il en faire ? A quoi pourrait-elle bien lui servir ?
-Elle a un rapport avec mon rêve. Songea le hérisson. Peut-être pourra-t-elle me permettre d’en apprendre plus à son sujet…A tout hasard, je ferais mieux de la garder avec moi.
Il la mit dans son sac et se remit en marche. Plus vite, cette fois. Il patina pendant quelques heures, sans rien voir d’autres que la forêt. Des arbres, de l’herbe, d’autres plantes et des animaux. Puis, finalement, il déboucha dans une clairière.
Shadow resta à couvert, sur ses gardes. Si la base d’Eggman se trouvait vraiment ici, ses robots pouvaient surgir n’importe quand, de n’importe où. Il jeta un coup d’œil dans la clairière. Elle semblait ordinaire, une vallée comme on en voit des centaines, mis à par l’énorme rocher, en son centre. « Un rocher peu habituel », avait dit la voix. Pourtant, ce rocher avait l’air normal. Vu d’ici, en tout cas...
Il commença à faire le tour du rocher, toujours sur ses gardes. Rien d’anormal, mis à part qu’aucune mousse ne poussait sur la pierre…
Soudain, Shadow s’immobilisa. Estomaqué, il regardait toujours le rocher et, pendant quelques instants, il crut sérieusement qu’il allait éclater de rire. Aussi discrète qu’une enseigne au néon dans le désert en pleine nuit, la tête d’Eggman avait été gravée dans la roche.
-C’était bien la peine de cacher votre base sous terre ! Songea le hérisson, un sourire amusé sur les lèvres. Docteur, vous n’avez pas fini de m’étonner…
Mais il retrouva vite son sérieux. Apparemment, c’était bien la base d’Eggman. Ce qui signifiait que la voix de son rêve avait dit juste. Cela signifiait également que les robots du docteur arriveraient vers 11h. Shadow retourna vite se cacher derrière les arbres, de façon à pouvoir garder un œil sur la tête sculptée dans le rocher. Evidemment, il n’avait pas de montre pour connaître le moment précis de l’arrivée des robots. Le soleil était déjà haut dans le ciel, mais il pouvait tout aussi bien devoir attendre encore une ou deux heures avant de les voir apparaître.
Il s’assit et commença à réfléchir à un plan. Il ne pouvait pas simplement entrer avec un robot et demander poliment à Eggman où il pourrait trouver un très vieux volcan qui renfermerait son passé !
-L’ennui, songea-t-il, c’est que je ne sais rien de ce volcan. Eggman a peut-être des dossiers dessus, mais il me faut une base…
Il regarda pensivement la sphère, la faisant tourner sur elle-même dans sa main. Quelque chose attira alors son attention. Il avait l’impression de voir une sorte de fumée, à l’intérieur. Il se frotta les yeux, puis regarda à nouveau. Il n’y avait pas de doute possible : une fine brume tourbillonnait lentement dans la sphère. Shadow avait l’impression de se retrouver face à une boule de cristal en miniature. Il l’approcha de son visage.
Il ne vit rien de particulier, mais il crut entendre un murmure qui venait de la sphère. Une sorte de chuchotement caverneux, étrange sans être effrayant. Il mit la sphère contre son oreille.
Tout d’abord, il n’entendit que des murmures sans paroles, une sorte de souffle profond. Puis, il entendit un mot, un seul.
« Anabora »
Shadow cligna des yeux, surpris. Il regarda la sphère avec méfiance. Qu’était-elle donc ? Quels étaient ses pouvoirs ? Ne serait-il pas plus prudent de la détruire ?
-Non, songea-t-il, je ne dois pas m’en séparer. Cet objet me permettra peut-être de savoir enfin qui je suis vraiment. Ce n’est pas le moment d’avoir peur. Je dois plutôt me demander ce que signifie « Anabora ».
Il répéta ce mot plusieurs fois, réfléchissant intensément. Il le murmura en se remémorant les différents lieux et paysages qu’il avait vus. Ce mot s’adaptait à
à peu près tous, sauf les lieux habités par les humains.
Quand il se souvenait d’une ville, le mot semblait étranger, écorché par ce paysage urbanisé.
-Il me rappelle quelque chose…Marmonna le hérisson. Il me rappelle quelqu’un.
Finalement, il se souvint, et sa découverte le surprit énormément. « Anabora » lui faisait penser à l’un des amis de Sonic, l’un de ceux qui l’avaient suivit quand le hérisson bleu avait combattu Métal Sonic. C’était cet échidné écarlate excessivement combatif, qui semblait beaucoup intéresser Rouge… Son nom était Knuckles. C’était également le gardien de la grande émeraude que convoitait la chauve-souris.
Quel pouvait bien être le rapport entre Knuckles et « Anabora » ? Peut-être qu’Eggman le savait…
-Je vais m’incruster en douce dans la base. Décida Shadow. A partir de là, je chercherai les dossiers du docteur. Ça m’étonnerai beaucoup que ce soit son QG, mais il doit bien y garder quelques informations.
Un bruit métallique le fit alors sursauter. Un robot venait de tomber d’un arbre et se dirigeait à présent vers le rocher. Il avait une apparence humanoïde, et il portait à la main…un énorme balai. Une fois de plus, le hérisson crut qu’il allait éclater de rire. Deux fois dans la même journée. Shadow n’était pas habitué à ce genre de chose…
Il suivit le robot, en faisant attention de rester hors de son champ de vision. Mais apparemment, il se donnait du mal pour rien. En effet, le robot s’était cogné à trois arbres avant de trouver enfin la direction du rocher. Là, il se cogna sept fois de suite au logo d’Eggman, puis il tourna autour de la roche en marmonnant des paroles incompréhensibles.
Shadow eut la présence d’esprit de suivre le robot de près. Aussi vit-il une partie du rocher s’ouvrir et une grande main mécanique saisir le robot pour l’entraîner dans les profondeurs de la terre. Le hérisson fila aussi vite que le lui permettaient ses chaussures à réaction et agrippa le « bras » de la main mécanique.

Le fils des Enfers

Shadow se retrouva entraîné dans un tunnel de métal vertical, bardé de fils électriques. Il préféra fermer les yeux, se concentrant uniquement sur sa prise. S’accrocher à du métal lisse n’était pas une mince affaire et cette machine, de toute évidence, n’était pas conçue pour accueillir un passager. Elle descendait rapidement, entièrement à la verticale. Si Shadow glissait, il aurait peu de chance de parvenir à récupérer une prise.
Il avait attrapé le bras mécanique très vite, sans vraiment réfléchir, et il s’était contenté dans l’empoigner, le saisissant plus avec les mains qu’avec les bras. Cette position lui faisait affreusement mal aux doigts, mais il ne pouvait plus prendre le risque de changer de position. Il dut donc attendre, les dents serrées, d’arriver au bout du tunnel.
Finalement, l’engin ralenti, sans doute pour déposer sa cargaison. Le hérisson ouvrit les yeux. Il se trouvait dans une sorte de hangar sombre, aux murs vides. Il y avait, en outre, de très nombreuses portes, toutes ouvertes. Le docteur ne devait pas s’attendre à une infiltration venant de cet endroit. Shadow jugea plus prudent de ne pas descendre avant que le bras n’ait amorcé une nouvelle ascension. Il n’avait pas très envie de se retrouver nez à nez avec un robot d’Eggman, bien que le robot en question semblait compter parmi les machines les plus stupides que ce monde ait connu.
Shadow le regarda épousseter chaque recoin de la pièce avec des cliquetis métalliques. Puis il se dirigea vers l’une des portes en balayant chaque grain de poussière qui passait à sa portée. Le hérisson lâcha son « moyen de transport » et regarda autour de lui. Il était dans la place, mais maintenant, où devait-il chercher ?
-Ce Knuckles…C’est un ami du hérisson bleu. Est-ce que je devrais chercher des informations sur lui ?
Mais il ne faisait aucun rapprochement entre le hérisson et « Anabora ». Aussi décida-t-il de chercher sur les échidnés, puis, s’il n’avait rien trouvé, sur les chasseurs de trésors.
-Bon, O.K, je prends quelle porte ?
Elles se ressemblaient toutes. Il y en avait des dizaines. Il examina chacune d’elles, mais ne trouva aucun indice sur l’endroit où elles menaient. Toutes s’ouvraient sur un couloir. Shadow décida d’aller le plus profondément possible dans la base. Après quelques minutes de réflexion, il prit la porte la plus petite.
Il avançait prudemment, prêt à se battre si quelqu’un approchait. Mais cette base semblait calme et peu sécurisée. Elle ne devait pas être très importante. Le hérisson constata, les sourcils froncés par la mélancolie, qu’il ne risquait pas de découvrir des traces de sa mémoire ici.
Il continua d’avancer, mais plus lentement. Il commençait à douter du bien-fondé de cette expédition. Même si ce qu’il avait entendu s’était révélé juste, était-ce vraiment prudent d’obéir aveuglément à son rêve ? Et en supposant que ce ne fut pas un rêve, comment savoir ce que lui voulait cette voix ? Pourquoi l’aiderait-elle ? Cherchait-elle à l’entraîner dans un piège ? Comment savoir ?
Il était prêt à revenir sur ses pas, quand une faible lumière blanche, au bout du couloir, attira son attention. C’était une lumière d’ordinateur.
Shadow s’approcha, le cœur battant. Si cet ordinateur pouvait contenir des informations sur Anabora. Si Anabora permettait de trouver l’ancien volcan. Si ce volcan contenait le secret de son passé…Cela faisait beaucoup de « si ».
Il arriva enfin dans la salle. Il y avait des écrans de surveillance sur tous les murs, reliés à un ensemble de boutons de contrôle. Les ordinateurs étaient allumés.
Shadow s’approcha des boutons de contrôle. Après avoir regardé prudemment autour de lui, il commença ses recherches. Il regarda les dossiers du docteur sur les échidnés. Il y trouva des documents sur Knuckles, sur la légende de Chaos et de l’Emeraude Maîtresse, sur les Chaos Emeralds, plus quelques documents sur les échidnés en général.
Un document attira son attention : « Lieux nommés et protégés par les échidnés »
Si « Anabora » lui rappelait les échidnés, c’était peut être parce que c’était des échidnés qui lui avaient donné ce nom ! Une main sur son cœur pour calmer sa respiration, Shadow ouvrit le document.
Il y était. Parmi la liste de noms de lieux, il y avait Anabora. Le hérisson commença à lire :
Anabora a pour réputation d’être le plus ancien volcan du monde. Son nom lui a été donné par les échidnés, mais on l’appelle aussi couramment « le Fils des Enfers ». Ce volcan est très difficile d’accès et personne ne sait ce qu’il contient. Cependant, les échidnés le protègent de tous ceux qui s’en approchent, on peut donc supposer qu’il contient un temple.
Comme on le sait, les temples des échidnés peuvent renferment soit de précieux trésors, soit des légendes et autres vestiges du passé.

Des "vestiges du passé »... Ces mots résonnèrent longtemps dans l’esprit de Shadow. Ce pouvait-il qu’il s’agisse de son passé ? C’était peut-être trop demandé…
Il y avait également des cartes qui indiquaient l’emplacement du volcan. Le hérisson en imprima deux. L’une indiquait l’emplacement de la chaîne de montagne, l’autre l’emplacement exact du volcan.
-Dommage, songea Shadow, si j’avais une Chaos Emerald, j’y serai déjà.
Il soupira.
-Bon, tant pis, je vais y aller à pied. Anabora, prépare-toi à accueillir l’espèce vivante suprême !
Bien sûr, il ne se doutait pas qu’il serait à ce point accueilli…

Dans les montagnes

Shadow s’arrêta un instant pour reprendre son souffle, en faisant bien attention de ne pas regarder sous lui. A présent, il comprenait pourquoi personne ne venait jamais par ici.
Quand il était arrivé devant la chaîne de montagnes, il était resté muet d’étonnement. Les premières montagnes étaient de véritables falaises qui s’élevaient jusqu’au ciel, formant face à lui une forteresse digne de la Grande Muraille de Chine. Il semblait impossible de la franchir.
En s’approchant, il avait remarqué les crevasses plus ou moins larges qui fissuraient les remparts de pierres. Certaines étaient profondes, mais aucune n’aboutissait de l’autre côté des montagnes. Shadow avait secoué la tête. C’aurait été trop simple.
Il avait donc choisi une option nettement moins réjouissante. En ce moment même, Shadow était agrippé à la falaise, s’appuyant aux bords d’une crevasse. C’était un exercice épuisant et dangereux. Le hérisson se sentait écrasé par la falaise imposante. Plusieurs fois déjà, il avait dû changer de crevasse, celle qu’il empruntait devenant trop étroite. Il avait cru devenir malade de peur.
Mais Shadow n’était pas n’importe qui. Pas une fois il ne songea à redescendre. Il avait toujours ignoré sa propre peur avec mépris. Aussi montait-il sans relâche, gardant les yeux fixés sur le sommet.
Il en était à peu près à la moitié de la falaise, il était éreinté et avait le souffle court. Malgré toute son agilité et son endurance, l’exercice était éprouvant.
Plusieurs fois, il avait dérapé et ne s’était rattrapé que de justesse, parfois accroché d’une main à une prise branlante.
-Ah, Mince !
Arrivé aux trois quarts de la falaise, il s’aperçut qu’il n’y avait plus de crevasse. Il allait devoir continuer en s’accrochant à la muraille de pierre presque lisse.
Il grogna en songeant à Rouge qui, avec ses talents de chasseuse de trésors, serait déjà en haut si elle avait tenté l’escalade.
Shadow soupira et reprit son ascension. Les prises devenaient de plus en plus dures à trouver, le plus souvent on pouvait à peine les voir. Elles étaient suffisamment stables pour qu’on puisse s’appuyer dessus le temps de chercher une nouvelle prise, tout aussi inconfortable. Parfois, il devait sauter pour en atteindre de nouvelles. C’était une expérience terrifiante. Il savait qu’il n’avait droit qu’à un seul essai.
C’est avec surprise qu’il sentit, au bout de plusieurs heures d’escalade, une surface à peu près plate. Il s’y hissa, incrédule, puis regarda derrière lui. Il sut alors qu’il avait réussi. Il regarda la falaise, sous lui, et failli tomber raide. Il était tellement haut qu’il voyait à peine le sol. Tout un bataillon de militaires de GUN aurait pu agiter des draps rouges devant les montagnes sans que le hérisson ne remarque rien. La falaise semblait à présent plus lisse que le verre.
Il se détourna de ce qu’il avait derrière lui pour vérifier le chemin qu’il lui restait à faire. Il sentit alors son estomac se contracter. De nombreuses montagnes, recourbées et étroites, où ne poussait que peu de végétation, dressaient leur pointe vers le ciel. On aurait dit des cornes de pierres entreposées là ou un immense bûcher aux flammes figées par la pierre. Au milieu de ces montagnes, il y avait Anabora.
C’était un volcan immense, démesuré. De gros panaches de fumée s’élevaient de son cratère. Shadow l’entendait gronder, de là où il était. Le Fils des Enfers portait bien son nom. Il était tout à fait plausible qu’un volcan de cette taille dissimule un temple d’échidnés. Mais était-il vraiment possible qu’il renferme le passé de Shadow ?
Le hérisson se sentait tout de même rassuré. Comparé à ce qu’il avait derrière lui, ce parcours dans les montagnes semblait presque simple. En tout cas, il n’aurait plus à faire d’escalade aussi périlleuse.
Il sortit alors la sphère de son sac, et la regarda pensivement. La brume continuait d’y flotter, et elle était même plus épaisse qu’au départ. Elle continuait de répéter « Anabora », dans un murmure impatient. Shadow était persuadé, à présent, qu’il devait à tout prix amener cette sphère au volcan. C’était peut-être le seul moyen de se souvenir…
Il commença à courir, contournant les montagnes les plus hautes. Son cœur battait à tout rompre. Ces montagnes, par leur côté inaccessible et imposant, avaient quelque chose de sacré, de puissant. Immobiles et formidables, elles semblaient défier les choses et le temps de les détruire.
Les échidnés avaient dû longuement chercher, avant de trouver un endroit aussi sûr et symbolique pour ériger leur temple. Mais de quel genre de temple pouvait-il bien s’agir ?
Voilà les questions que se posait Shadow, tandis qu’il slalomait entre les montagnes, sautant par-dessus les rochers et les fosses, contournant certaines montagnes et coupant par les plus petites.
C’était un bon terrain pour la course. Le sol était sec, parsemé çà et là de touffes d’herbes éparses. Il n’y avait pas d’arbres, mais de petites plantes qui serpentaient sur le sol. Le tout semblait aride et féroce. Chaque chose était coupante ou solide, de sorte que le hérisson avait l’impression de se trouver face à la plus imposante des armées. Il était impressionné, mais il ne s’autorisait pas à avoir peur.
La vitesse de ses chaussures à réaction aidant, il se trouva rapidement devant Anabora. Vu d’aussi près, le volcan semblait si immense qu’on en avait le vertige. Pas une seule touffe d’herbe ne poussait dessus, seules les roches et les irrégularités du terrain troublaient sa surface. Et il était si large qu’on aurait pu jeter Angel Island tout entière dans le cratère, sans qu’elle ne touche les parois. Il fumait et grondait tant que Shadow pouvait sentir le sol trembler sous ses pieds. Il sentait également la chaleur que dégageait le volcan, et il dut passer une bonne minute à tousser et à reprendre son souffle, en respirant l’air chaud mêlé à la poussière qui planait autour du mont.
Il entreprit tout d’abord de faire le tour de la base, en quête d’une éventuelle entrée. Cela prit, malgré sa vitesse, au moins une heure. Il finit par découvrir une chose intéressante. Sur le flanc du volcan se tenait un rocher environ deux fois plus gros que lui. Or, aucun autre rocher de cette taille ne se trouvait dans les parages. De plus, en l’examinant attentivement, Shadow s’aperçut qu’il avait été déplacé de nombreuses fois. Il devait renfermer une entrée…
-Mais c’est idiot, songea le hérisson, pour soulever un rocher de cette taille, il doit falloir un levier, quelque chose comme ça. Pourquoi se sont-ils donné le mal de devoir emmener tout un appareillage avec eux pour entrer ?
Il se rappela alors de la force exceptionnelle de Knuckles, qui pouvait soulever sans peine un rocher bien plus gros que lui. Les autres échidnés devaient sans doute posséder une force similaire. Il était très probable que le seul outil dont ils aient besoin pour ce genre de travail, c’était leurs poings.
Mais Shadow, lui, n’était pas un échidné. Il ne pouvait pas soulever un tel rocher. Mais peut-être pouvait-il tenter de le détruire ? C’était à essayer.
Il commença donc à s’acharner sur la roche, enchaînant Spin Attacks et Homing Attacks. Le rocher était solide et semblait tenir bon. Seuls de petits débris de roche tombaient. Le hérisson passa donc plusieurs heures à frapper violemment la pierre, ignorant sa fatigue. De grosses gouttes de sueur coulaient sur son visage, et son corps était meurtri par ses attaques répétées. Pourtant il ne faiblissait pas et frappait toujours plus fort, sans ralentir la cadence.
Enfin, il vit des lézardes de plus en plus profondes se former dans la roche. Les débris qui tombaient devenaient peu à peu de véritables morceaux de pierre. Quand il sentit qu’un dernier coup suffirait à le faire exploser, Shadow s’arrêta et s’accorda une pause. Une fois à l’intérieur du volcan, il aurait peut-être à se battre. Il valait mieux qu’il se repose avant d’entrer.
Il s’assit et respira profondément. Il ne se souvenait pas avoir déjà dû fournir autant d’efforts dans la même journée. Escalader des falaises et détruire d’énormes rochers n’étaient pas vraiment la spécialité de Shadow. Il préférait la course, le combat rapide et soudain. Tout ce qui mêlait force et vitesse. Mais en l’occurrence, l’enjeu était trop important pour faire le difficile. Aurait-il fallu traverser le monde entier à la nage pour rejoindre ce volcan, il y serait allé sans se soucier de son incompétence dans les milieux aquatiques. Il était prêt à aller n’importe où, à faire n’importe quoi pour retrouver sa mémoire. Il voulait voir ses souvenirs bien clairs dans son esprit, qu’il soit ou non un robot.
Le cri perçant d’un oiseau de proie, au-dessus de lui, lui rappela que le temps passait. Il se sentait suffisamment reposé pour continuer, à présent.
Il se leva et lança une ultime attaque contre le rocher, qui se brisa, explosant presque, ses morceaux s’éparpillant de tous côtés. Shadow avait à présent sous les yeux une ouverture suffisamment grande pour qu’il puisse la franchir en restant debout. Elle était creusée dans une pierre taillée, où d’étranges symboles étaient gravés. Assez loin dans les entrailles d’Anabora brillait la lueur de torches. Le hérisson inspira un grand coup, puis il s’engagea dans l’ouverture.

Le cœur d’Anabora

Shadow marchait depuis un quart d’heure environ. Ce tunnel ne semblait pas avoir de fin. Il était étroit, de forme carrée, et il serpentait tout en restant régulier. Le chemin montait, descendait et tournait, s’enfonçant de plus en plus profondément dans la montagne. Il ne faisait pas aussi chaud que ce que le hérisson avait tout d’abord cru. La température était à peu près la même qu’à l’extérieur. C’était peut-être un aménagement des échidnés.
D’étranges écritures étaient gravées sur les parois, semblables à celles que Shadow avait vues sur l’entrée. Quelques torches se consumaient lentement, accrochées aux murs par des anneaux de pierre. Il se demanda qui pouvait bien les entretenir. Devait-il s’attendre à rencontrer quelque chose ou quelqu’un, dans ce temple étrange ?
Le hérisson marchait, sans oser accélérer. L’atmosphère tranquille du lieu le poussait au silence et à la discrétion. Aussi avançait-il avec prudence, silencieusement et furtivement, retenant son souffle.
Il déboucha finalement dans une salle. Elle était immense, et soutenue par de nombreux piliers. Le sol était fait de pierre polie, où d’immenses symboles de flammes étaient gravés. Mais ce n’étaient pas des gravures ordinaires. Par on ne sait quel procédé magique, les sillons dans la pierre étincelaient. La lumière changeante et vacillante du feu brillait dans les motifs. L’effet était impressionnant. On avait l’impression de marcher dans une immense fournaise en deux dimensions, qui s’étendait sur plusieurs centaines de mètres. C’étaient ces gravures qui illuminaient la salle. Sur les murs et les piliers étaient dessinés des écritures et des fresques floues.
Sur l’une d’elles, une étrange scène était représentée. On voyait une terre vide et stérile, totalement désolée. Une créature féminine, dont il était impossible de déterminer l’espèce, se tenait debout, les bras tendus vers le ciel. Dans ses mains en coupe brillait une immense flamme. Devant elle, un volcan démesuré semblait surgir de terre.
Le sol n’était pas plane, sous les pieds du hérisson. La salle était légèrement en pente. Ou plutôt le couloir. Car cette partie du temple s’enroulait autour d’un énorme mur en forme de cylindre et montait en spirale, un peu comme un escalier en colimaçon, mais sans l’escalier. Shadow n’en revenait pas. Jamais il n’avait vu un spectacle aussi impressionnant.
Il sentit alors la sphère vibrer, dans son poing. Il la regarda, surpris. La brume qui tourbillonnait à l’intérieur était devenue si dense qu’elle semblait vouloir briser la paroi de verre. Elle vibrait à intervalle régulier, sans doute pour se manifester. Peut-être pouvait-elle lui indiquer ce qu’il convenait à présent de faire. A tout hasard, il l’approcha de son oreille.
Il entendit immédiatement le murmure précipité et résonnant, qui répétait inlassablement le nom du volcan. Il ferma les yeux pour se concentrer uniquement sur ce qu’il entendait.
-Anabora… Anabora… Chuchotait la sphère. Le centre… Anabora…
Mais il n’eut pas le temps de s’interroger sur cette nouvelle manifestation, car un projectile dur et brûlant le frôla de si près et à une telle vitesse qu’il fut projeté à terre. Il roula aussitôt sur le côté et se redressa pour faire face à son adversaire. Tout ce qu’il vit fut une boule de feu aussi grande que lui filer dans sa direction. Il l’esquiva juste à temps et tenta de l’examiner.
C’était un squelette, entouré de flammes. Mais Shadow aurait été bien incapable de reconnaître de quel squelette d’animal il s’agissait. Cela ressemblait à un quadrupède aux pattes griffues. Il semblait tout de même pouvoir se tenir debout. Son squelette ressemblait à celui d’un félin, mis à par le crâne.
Le crâne était la partie la plus étrange de ce monstre. Entièrement lisse, il était constitué d’un seul os creux. Il n’y avait pas d’ouverture pour la bouche ou les narines. Il était légèrement pointu au niveau du menton, et deux petites cornes arrondies dépassaient, orientées vers l’arrière du crâne, juste sous l’endroit où des oreilles d’humain auraient pu apparaître. Mais la créature n’avait pas d’oreilles. Par contre, elle avait des yeux. Des yeux immenses et effrayants, constitués de deux rubis taillés.
Mais surtout, le monstre semblait fou de rage. Il s’élança de nouveau vers Shadow, projetant sur lui l’un de ses os enflammés. Ceux qui manquaient leur cible revenaient immédiatement à leur place, tels des boomerangs. Le hérisson ne pouvait rien faire d’autre qu’esquiver, faisant maintes acrobaties pour éviter les projectiles. Ce monstre était de toute évidence le gardien du lieu, et il ne semblait pas être d’humeur à discuter. Les os qui sifflaient autour de lui se mêlaient aux gravures de flammes sur le sol. Tout semblait tourner et s’agiter sous les yeux du hérisson. Il n’y voyait plus rien. Sa première impulsion fut donc de fuir. Il prit instinctivement le chemin qui montait et semblait mener à la sortie. Le monstre le poursuivait, continuant d’attaquer avec ardeur.
Puis Shadow se souvint des paroles de la sphère : le centre d’Anabora. C’était là qu’il devait aller. Sinon, toute cette expédition périlleuse et désagréable n’aurait servi à rien. Il devait à tout prix atteindre le centre du volcan, monstre ou pas. Et il ne faisait aucun doute que pour arriver au centre, il fallait descendre.
Il fit volte-face et chargea son ennemi, plus pour le surprendre que pour le mettre hors combat. Mais il ne put pas aller jusqu’aux bout de son attaque. Le monstre dégageait une chaleur insupportable, mortelle. Il sauta donc juste avant que la créature ne se jette sur lui et le brûle vif. Le poil roussi, le hérisson fila vers les profondeurs du volcan. Sa tête tournait. La danse effrénée du feu, autour de lui, lui faisait perdre ses repères. Il ne savait plus exactement où il allait, dans quel sens. Il se sentait emporté dans un bal infernal. Il crut devenir fou.
Le monstre, en le voyant se diriger vers le cœur du temple, poussa un hurlement de colère et se lança à sa poursuite, avec plus de vigueur que jamais. Shadow, troublé par les flammes, ne parvenait pas à atteindre sa vitesse maximale. La créature était donc juste derrière lui, et il l’entendit parler, d’une voix rauque et furieuse.
-N’approche pas…Je te tuerai…Oui, tu perdras la vie pour avoir osé entrer ici…Je le sens…Profanateur…
Le hérisson continua donc sa course infernale, esquivant les os ardents et les piliers du temple, tournant sans cesse autour de l’immense pilier central, descendant toujours plus bas, toujours plus profondément dans le volcan, poursuivi par le monstre et ses paroles furieuses.
-Je te tuerai…Oui, je le sens…Je sens la cruauté, je sens l’irrespect …Profanateur…N’approche pas…Je sens la convoitise…Je te tuerai…
Le chemin commençait à s’écarter du pilier, formant une spirale qui s’élargissait sans cesse. La pierre qui constituait les murs était taillée de manière moins soignée, elle semblait avoir été creusée à la hâte. Les gravures sur le sol brillaient moins, il faisait plus sombre. Le sol était de plus en plus chaud, l’atmosphère de plus en plus étouffante. Shadow transpirait, sa gorge le brûlait, il ne voyait plus rien. Il ne pensait plus qu’à avancer, toujours plus loin, toujours plus bas, jusqu’aux enfers s’il le fallait.
Le chemin cessa brusquement de descendre et prit un virage serré. Il continua ensuite tout droit vers une ouverture, où brillait une lumière flamboyante. Le hérisson s’y précipita. De toute façon, c’était sa seule possibilité. Quelques secondes avant d’atteindre l’ouverture, il entendit le monstre, juste derrière lui, qui le menaçait, plus furieux que jamais.
-N’approche pas…Je te tuerai…Eux seuls le peuvent…Profanateur…Je te tuerai !
Shadow franchit l’ouverture et resta paralysé sur place. La salle était démesurée, si grande qu’on n’en voyait pas le bout. Elle aurait sans doute pu contenir la colonie ARK toute entière. Le plafond était en forme de dôme. En son centre, un immense trou circulaire montait jusqu’à l’air libre. Ce devait être le fameux pilier central, autour duquel s’enroulait le temple.
Mais le plus impressionnant n’était pas le plafond. Au centre de la salle, semblant surgir tout droit du noyau terrestre, un feu gigantesque brûlait, légèrement surélevé à l’aide d’un socle en forme de coupe. Les flammes formidables montaient jusqu’au dôme et venaient lécher la pierre du plafond. La fumée qu’il dégageait s’engouffrait dans le trou et devait sortir par le cratère. L’atmosphère brûlante permettait à peine de respirer.
Shadow sentit alors un choc terrible dans son dos et il fut projeté à quelques mètres. Le monstre avait profité de son ébahissement pour le frapper de plein fouet. Grognant de douleur, une grande marque de brûlure imprimée sur son dos, le hérisson tenta de se relever. Il s’aperçut alors que la sphère de verre lui avait échappé des mains et il la chercha des yeux, espérant qu’elle ne se soit pas brisée sous le choc.
Il la repéra finalement, à quelques mètres de lui. Elle semblait intacte mais… Quelque chose d’étrange se produisait. Elle vibrait et tremblait, son murmure impatient résonnant plus fort que jamais. La brume s’échappa lentement de la sphère, sans briser la paroi. Elle l’enveloppa complètement, puis une chose invraisemblable se produisit. Elle s’éleva dans les airs, portée par la brume, et fila vers la fournaise.
Le monstre, en la voyant, se désintéressa aussitôt du hérisson et se précipita vers elle, sifflant de fureur.
-Profanateur…Je te tuerai…N’approche pas…N’approche pas !
Mais trop tard. La sphère pénétra dans le feu. Là, elle tourbillonna de plus en plus vite sur elle-même, au milieu des flammes. Shadow crut alors voir, mais c’était peut-être une illusion d’optique due à la chaleur ou à tous ces mouvements, une flamme apparaître à l’intérieur de la sphère. Puis, celle-ci cessa de tourner et fut projetée vers la surface.
Tout c’était passé très vite. Ni Shadow ni la créature n’avaient eu le temps de réagir. Celle-ci murmura, d’une voix troublée :
-La cruauté…Le profanateur…Je ne les sens plus…
Elle se tourna vers le hérisson, qui tentait de se relevait en grimaçant de douleur.
-Je ne les sens pas…En toi…Tu n’es donc pas…Un profanateur…Je ne sens plus la convoitise…Je ne sens que l’incertitude…Comme c’est étrange…
Sa voix reprit alors de l’assurance. Elle n’était plus haletante, ni déformée par la colère qui l’avait saisie.
-Qui es-tu ? Qu’es-tu venu chercher ici et que faisait ce profanateur avec toi ?
Il s’aperçut alors que le hérisson semblait être très incommodé par la chaleur du feu central, et par sa propre chaleur. Il leva les bras vers le ciel, murmurant une incantation dans une langue inconnue. Aussitôt, les flammes de son corps refroidirent jusqu’à devenir des braises tièdes. Il s’approcha de Shadow l’aida à marcher, l’entraînant vers l’entrée du temple.

Le Médaillon de Lumière

Shadow raconta toute son histoire au gardien, lui expliquant tout ce dont il se souvenait. Ils étaient assis contre un mur du temple, non loin du tunnel qui menait à l’extérieur du volcan. Le monstre l’écouta attentivement, jusqu’au bout. A la fin du récit, il secoua lentement la tête et lui dit :
-Une machination. Quelqu’un a profité de ton incertitude pour te conduire à ce temple. Tu as été victime de ta propre détermination à retrouver la mémoire.
-Vous m’avez parlé d’un profanateur qui serait avec moi, tout à l’heure. Mais pourtant, j’étais seul. De quoi parliez-vous ?
Le gardien émit un grognement de fureur. Les flammes de son corps se firent plus ardentes, forçant le hérisson à s’écarter de lui.
-Je l’ai senti…Siffla-t-il, retrouvant sa voix haletante et menaçante. Un profanateur…Sa cruauté…Sa convoitise se sentaient depuis cet objet de verre…Il venait pour piller…Il venait pour profaner…
-C’est donc ce profanateur qui m’a envoyé la sphère.
Shadow sentit une colère croissante naître en lui. Quelqu’un s’était servi de lui ! On l’avait dupé !
-Mais vous-même, demanda le hérisson, retrouvant son calme, comment vous appelez-vous ? Et quelle est votre histoire ?
-Un nom, le destin m’en a privé. Appelle-moi Anabora, comme ce temple que je protège. Appelle-moi Gardien, ce que je suis. Appelle-moi Feu, dont je suis constitué. Ces trois mots me désignent, je n’ai jamais eu besoin d’un nom.
Quant à mon histoire, je n’en ai pas plus. Je garde ce temple et le Feu Central. Je n’ai ni passé ni avenir, juste mon présent et mon devoir.
-Vous ne voyez donc jamais personne, ici ?
Le discours du monstre attristait Shadow, bien qu’il sache que le gardien était un monstre, et non un hybride.
-Peu de gens. La plupart du temps, ceux que je vois doivent mourir. Seuls les guerriers échidnés ont le droit d’entrer ici.
Le hérisson sursauta. Il avait beau avoir perdu la mémoire, il se souvenait tout de même que les échidnés n’avaient plus déclaré la guerre à personne depuis des siècles !
-Des guerriers échidnés ? ! Il en existe encore ?
-Tous les échidnés sont des guerriers. Dès le moment où ils sont prêts à mourir et à tuer, ils deviennent guerriers.
-Mais ils ne se battent plus depuis des siècles !
-Ah non ?
Ce n’était pas vraiment une question. Cela ressemblait plutôt à une manière de dire à Shadow qu’il se trompait. Celui-ci soutint son regard. Il ne se souvenait plus de grand-chose, alors si les rares certitudes qu’il avait se révélaient fausses…Puis soudain, il comprit :
-Les humains ?
-C’est exact. Les échidnés continuent de se battre. Il existe encore de nombreux humains pour leur déclarer la guerre. Les humains ne sont pas prêts de les laisser en paix…
-Je vois…Mais les échidnés ne doivent pas venir souvent ici.
-Il est vrai. Il fut une époque où ils venaient annuellement. Mais à présent, ils ne viennent que très rarement. Ils ont pour règle de ne pas troubler ces lieux sans motif.
Le hérisson était désemparé. Cet être était encore plus démuni que lui. Il n’avait ni identité, ni temps, ni espace. Il était seul et froid, malgré les flammes qui léchaient son squelette. Et pourtant, il semblait vivant.
-Le temps passe, reprit Gardien, et je n’ai que trop parlé. Retourne à ta quête, à présent… !
Il s’interrompit. Une lumière blanche surgissait d’entre ses côtes. Le monstre semblait paralysé, ses yeux de rubis fixés sur la lueur.
-Anabora ! S’exclama Shadow, inquiet. Que se passe-t-il ?
-Je n’aurais jamais cru une telle chose possible…La vie ne m’appartient pourtant pas…
Lentement, sans quitter des yeux la lumière, le monstre porta sa main griffue à son cou. Shadow ne put voir ce qu’il saisissait, l’objet étant masqué par les flammes de son squelette. Mais il ne faisait aucun doute que c’était de là que provenait la lueur.
Gardien saisit donc l’objet, qui semblait être une fine chaîne, et le fit passer par-dessus sa tête, puis il la tint devant lui, l’observant avec incrédulité. Le hérisson put alors voir clairement de quoi il s’agissait.
C’était un pendentif. Au bout de la chaîne brillait un médaillon en forme de losange. Il semblait être en cristal, il semblait être blanc, mais on ne pouvait être sûr. C’était ce médaillon qui engendrait la lumière. Une lueur douce, un peu faible. Gardien le regardait comme s’il n’avait jamais vu pareille lumière. Il la scrutait sans détourner les yeux, peut être de peur qu’elle ne s’éteigne.
-Quelle est cette chose, Anabora ? Demanda Shadow.
Il parlait doucement pour ne pas rompre trop brutalement la transe dans laquelle Gardien était plongé.
Celui-ci tourna enfin ses yeux vers lui et lui répondit lentement, serrant le médaillon dans sa main ardente.
-Cet objet est en ma possession depuis toujours. Je ne sais pourquoi, je ne sais d’où il vient. Mais je connais sa fonction. Il possède un pouvoir dont peu de personnes seraient capables de mesurer l’ampleur.
Il inspira profondément, cherchant des mots pour décrire ce pouvoir étrange.
-Trop souvent, commença-t-il, l’être conscient ne réalise pas lui-même ce qu’il est. Il ne sait s’il est généreux ou avare, orgueilleux ou modeste. Ce sont la plupart du temps les personnes qui l’entourent qui ont la faculté de voir sa valeur. On ne se juge pas soi-même, c’est indéniable. Ainsi, ce sont souvent les êtres alentours qui nous jugent dignes de confiance, de respect ou d’amitié.
Shadow l’écoutait en silence. Il ne savait pas si ce qu’il disait pouvait être la vérité, et il se demandait où il voulait en venir.
-Il est parfois bon de prêter l’oreille à ce que disent ceux que nous tenons nous-même en estime à notre sujet. C’est là le pouvoir de ce médaillon. Il se nourrit du jugement qu’ont les êtres conscients sur le porteur. Il s’allume en sentant un appui solide. Le voir briller signifie que quelqu’un, quelque part, est prêt à nous soutenir si le besoin s’en fait sentir. Il brille quand quelqu’un juge le porteur digne de considération et d’amitié. Plus la lumière est forte, plus ces personnes sont nombreuses et plus leur confiance est grande.
Jusqu’à ce jour, il est resté éteint entre mes mains.
Gardien regarda longuement Shadow, le scrutant de ses grands yeux de monstre.
-Ainsi…Tu me considères comme digne de ton soutien…
Le hérisson ne sut quoi répondre. C’était la vérité, et il avait lui-même du mal à y croire. Ce monstre-squelette qui l’avait attaqué sauvagement et qui ne possédait rien de plus que son devoir, il était prêt à le considérer comme un hybride ordinaire. C’était la vérité, mais il était inutile de le dire. Ce médaillon parlait pour lui, de sa lumière douce mais bien réelle.
Gardien inclina la tête et murmura :
-Je t’en remercie.
Il tendit alors le pendentif vers Shadow et le déposa dans sa main.
-Prend ceci. Dit-il. Si tu le regardes attentivement, tu verras peut être ma propre confiance parmi les autres lueurs.
Le hérisson resta abasourdi quelques instants. Dès l’instant où le losange de cristal était entré en contact avec sa paume, la lumière qui émanait de lui s’était faite au moins trois fois plus vive.
-Mais…Dit-il en essayant de lui rendre l’objet. Maintenant qu’il est allumé…Vous ne préférez pas le garder ?
-Non, loin de moi cette idée. Mieux vaut conserver le souvenir d’une lueur que la lueur elle-même.
-Je ne comprends pas…
-C’est pourtant simple. Garder la lumière consiste à vivre dans la crainte qu’elle ne s’éteigne un jour. Que tu sois ou non un robot, tu n’es pas à l’abri de la mort. L’essentiel n’est pas de vivre pour toujours aux yeux du monde entier. Il est suffisant d’avoir vécu quelques minutes aux yeux d’une seule personne.
Je sens l’incertitude en toi, ainsi que la peur. Tu te demandes qui tu es, si tu vaux la peine de vivre. Tu te demandes ce que tu penses toi-même. Ce médaillon peut au moins te donner l’avis de ton entourage. Cette lueur, un jour, te permettra peut-être de voir plus clairement en toi, et de savoir ce que tu veux faire du don de la vie.
Il repoussa doucement la main que Shadow lui tendait pour lui rendre le pendentif et lui ferma les doigts.
-Grâce à toi, j’ai pu vivre. Termina-t-il. A présent, je veux pouvoir t’aider dans ta quête, en te donnant la seule chose que je puisse donner, car je ne peux donner ce que je ne possède pas. Pars à présent, puisses-tu trouver des réponses à tes questions.
Sur ce, il se redressa et s’éloigna, descendant vers le centre du temple. Shadow resta encore immobile quelques minutes, puis il se leva à son tour et se dirigea vers le tunnel. Avant de partir, il regarda une dernière fois l’étrange fresque qu’il avait vue, et qui représentait sans doute la création d’Anabora. Il se demanda qui était donc cette créatrice, représentée de manière si floue.
Ce fut quand il sortit du temple qu’il sentit la colère éclater à nouveau en lui. Quelqu’un l’avait dupé ! Quelqu’un avait profité de sa perte de mémoire ! L’identité de ce nouvel ennemi ne faisait aucun doute. Qui savait que Shadow avait perdu la mémoire ? Qui savait où se trouvait la base du docteur ? Qui connaissait l’existence du temple ? Et qui serait suffisamment irrespectueux des règles pour se faire appeler « profanateur » par Gardien ?
La réponse ne faisait aucun doute. Eggman. Encore lui.
Emporté par la colère, Shadow fit volte-face et courut vers le sommet du volcan, sans prêter attention à la température difficilement supportable. Après une heure de montée, il se tint sur le bord du cratère, dos à la fumée qui s’échappait du Feu Central. Il observa les montagnes depuis cet observatoire titanesque, puis il hurla. Il criait sa rage, sa promesse de vengeance. Il avait tant craint et espéré, en poursuivant sa quête ! Et cet espoir c’était révélé être un piège. Il jura de retrouver celui qui l’avait trompé. Le docteur le reverrait un jour, il en faisait le serment.
Et ce jour-là, il regretterait d’avoir entendu parler de l’espèce vivante suprême.

Par Nadramon le 6 mai 2004

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